2.5/10Le Prisonnier version 2009 : ennuyeux et à côté de la plaque

/ Critique - écrit par riffhifi, le 02/03/2011
Notre verdict : 2.5/10 - Si Six scie ici, qui scie Sissi ? (Fiche technique)

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Refaire le Prisonnier de Patrick McGoohan, c’est comme : tourner un remake d’Orange Mécanique avec Justin Bieber, repeindre la Joconde avec un rouleau de sopalin, coudre une robe couleur de pollution, etc.

Refaire une série télé d’antan pour les spectateurs d’aujourd’hui, ce n’est pas forcément une mauvaise idée. Bon, dans la pratique, c’est souvent une vautre (voir le nouveau V, le nouveau Kojak, etc.), mais il arrive que certains concepts se prêtent à la réinvention, à la variation sur un thème. Ce n’est pas le cas de la série-culte de Patrick McGoohan : Le Prisonnier est une œuvre si unique, si intimement liée à la personnalité de son auteur… qu’il est totalement vain d’espérer la répliquer ou en faire un dérivé acceptable. La version 2009 de la série, même si on renonce à la comparer à son modèle, se révèle d’un ennui et d’une mollesse dramatique, plombée de surcroît par une prétention qu’elle ne peut pas se permettre.

Le Prisonnier version 2009 : ennuyeux et à côté de la plaque
Des décors d'enfer
L’histoire, on la connaît : après avoir démissionné de son travail, un homme se réveille dans le Village, où tout le monde s’obstine à l’appeler "Numéro 6". Un endroit dont il cherche à s’évader malgré la supervision de "Numéro 2" et la présence funeste du Rôdeur, une énorme boule blanche (!).

En 1967, Le Prisonnier était une claque, l’équivalent du Fight Club des années 90 : une métaphore instinctive des problèmes identitaires de l’homme moderne, coincé entre ses pulsions, son individualité d’une part, et les exigences de la société de l’autre. Bouillonnant de problématiques insolubles, abordées sous la forme d’un délire visuel et narratif hypnotisant. Spectacle avant tout, la série possédait l’énergie de son instigateur passionné : Patrick McGoohan était à la fois scénariste, producteur, réalisateur (d’un tiers des épisodes) et acteur principal. Dans la resucée XXIème siècle, Jim Caviezel a été consciencieusement choisi par une équipe de producteurs avisés, pour remplacer Christopher Eccleston initialement choisi. Le "Numéro 2", qui passait son temps à changer dans la série d’origine, est ici incarné par le seul Ian McKellen (le Gandalf du Seigneur des anneaux, le Magneto d’X-Men), qui livre de loin la performance la plus captivante de tout le casting. En-dehors de ces deux têtes d’affiches, qui ont probablement siphonné la majeure partie du budget (le Village ne présente aucune personnalité, il est planté au milieu d’un désert – probablement pour se distinguer de l’original, situé au bord de l’eau), les acteurs et les personnages sont réduits à peau de chagrin, à l’exception d’un Le Prisonnier version 2009 : ennuyeux et à côté de la plaque
DR.
taximan black et d’une scientifique enamourée.

Il faut bien dire que la production se limite à six épisodes, contre dix-sept dans la version 1967. L’action s’en trouve-t-elle plus intense, les rebondissements plus concentrés ? Euh, non. La mise en scène léthargique, l’image beige-grise sans relief, plombées d’une musique lancinante, font regretter les zooms frénétiques et les couleurs pop de l’ère McGoohan. Mais le plus grave, dans la somme des décisions désastreuses prises pour revamper le concept, reste l’approche "logique" de l’intrigue. Dans une tentative pataude d’émuler Lost, les auteurs s’enlisent dans une explication rationnelle de la présence du héros dans le Village, mais appuient pourtant le plus lourdement possible les nombreuses scènes de dialogue "métaphorique" : qu’est-ce qu’aimer ? qu’est-ce que vivre ? l'absolu ne doit-il pas être annihilé par l'illusoire précarité de nos amours destituées, et vice versa ? Incapable d’offrir un mélange harmonieux de réflexion et de divertissement, la série se plante finalement sur les deux tableaux.

Depuis bon nombre d’années, il est question de tirer un long métrage cinéma du Prisonnier. Mais depuis la mort de Patrick McGoohan, et au vu de cette série ratée, on souhaite que le projet reste indéfiniment dans les limbes de la préproduction.


#1 Arrival

#2 Harmony
#3 Anvil
#4 Darling
#5 Schizoid
#6 Checkmate

Le Prisonnier version 2009 : ennuyeux et à côté de la plaque
Deux tours, une boule.... c'est impossible !