1/10Le pensionnat de Chavagnes

/ Critique - écrit par Ichabod, le 24/09/2004
Notre verdict : 1/10 - Qui a eu cette idée folle ? (Fiche technique)

Objectif : certificat d'études

Nouveau concept de télé réalité échappé d'on ne sait quel cerveau, le « Pensionnat de Chavagnes » se propose de confronter des adolescents d'aujourd'hui, âgés d'une quinzaine d'années environ, à l'enseignement d'hier. Après nous avoir servi en vrac, le fameux « Loft Story » qui a mis le feu aux poudres, les émissions musicales type « Star Academy » et les programmes jouant sur l'endurance et le mental comme « Koh Lanta », voici venu l'ère des soi-disant émissions de télé réalité « instructives ». Oui, figurez vous que cette émission est censée montrer à notre jeunesse décadente les vraies valeurs des années cinquante.

Vingt-quatre de nos chères têtes blondes vont ainsi revêtir l'uniforme réglementaire, arborer une coiffure décente, jeter leur portables et autres gadgets et respecter la discipline de fer imposée par les surveillants, tout cela dans le but de décrocher le certificat d'études (et un petit paquet d'euros pour le premier), bien entendu. Etalée sur cinq épisodes plus une émission spéciale, la vie des élèves au pensionnat consiste principalement à étudier le français, le théâtre, les mathématiques, le chant, et l'histoire-géographie ; les différentes matières étant dispensées avec la méthode des années cinquante. On retrouvera par exemple le fameux tableau présentant les premiers de la classe et les bonnets d'âne, et la cuillérée d'huile de foie de morue quotidienne.

Matez les tous

L'école d'aujourd'hui n'est pas parfaite, sans doute. Est-ce pour autant un problème qui pourra entièrement se régler grâce à de la discipline et un enseignement typique des années cinquante ? Ce n'est pas à moi d'en décider. Mais en les combinant avec le voyeurisme classique de la télé réalité, l'exercice qu'espérait tenter « Le Pensionnat de Chavagnes » perd tout son intérêt, faisant la part belle au ludique, misant tout sur les conflits entre professeurs et surveillants d'une part et élèves d'autre part. Le commentaire s'applique d'ailleurs à appuyer ces problèmes, ainsi que les disputes entre élèves eux mêmes.
Appliquons donc les méthodes des années cinquante pour mater ces petits jeunes, dont on aura pris soin de prendre quelques éléments perturbateurs, quelques probables têtes de classe, et quelques rigolos, voilà qui nous assurera des moments de franche rigolade !
Les cours et la pédagogie étant calqués sur leur anciens modèles, il ne faut pas espérer une révolution dans ce domaine. Bien que certains professeurs encouragent les élèves les plus faibles, chaque erreur est sanctionnée de la même manière. Au final, constat d'échec, les punitions et autres décisions disciplinaires étant souvent inadaptés au problème (en gros ménage, copie, interdicions, colles), les élèves qui étaient dissipés le restent. Je ne nie cependant pas un effort de la part de certains enseignants à trouver le moyen de tirer le meilleur de chacun.

« C'était mieux avant ? »

Mais là ou l'émission devient encore plus écoeurante, c'est que dans cette espèce de cliché « c'était mieux avant » prôné par le concept, on oublie que l'évolution des moeurs a parfois du bon.
Les méthodes du pensionnat sont à mes yeux plus mauvaises qu'elles n'apportent de solutions. Un exemple concret demande le peuple ? Le sexisme -peut être involontaire, mais tout de même présent- dont fait preuve l'enseignement :

Les filles vont apprendre : la couture, la cuisine.

Les garçons vont apprendre : les sciences naturelles, les travaux pratiques.

Après tout, quoi de plus normal, les femmes au bercail, les hommes au travail [ironie amère, je précise pour ceux qui n'auraient pas compris]. Cette vision, ô combien passéiste, n'est que l'un des aspect malsain et dégradant de cette émission, qui finalement joue avec et sur les valeurs, émotions et sentiments d'adolescents légèrement désorientés. Qu'on me comprenne bien, les jeunes participants sont ce qu'ils sont, je n'ai aucun préjugé sur eux (on a tous été ados un jour). Je trouve simplement pathétique qu'on les utilise de la sorte, dans un concept qui n'a au final pour vocation que d'être lucratif.

Ethiquement très discutable.