8/10Melrose Place

/ Critique - écrit par Vincent.L, le 30/09/2005
Notre verdict : 8/10 - Swimming With Sharks (Fiche technique)

Tags : place melrose saison series role episodes amanda

Spin Off de Beverly Hills, 90210, Melrose Place débarque en juillet 1992 sur la FOX et en mai 1995 sur TF1. Créée par Darren Star, cette série américaine expose la vie d'individus habitant dans la résidence de Melrose à Los Angeles. Ayant rassemblé des millions de téléspectateurs de 1992 à 1999, le programme compte 7 saisons d'en moyenne 32 épisodes de 42 minutes, soit 228 épisodes en tout.

Tout commence bon enfant avec des amitiés de quelques personnages de Beverly Hills, 90210 et une introduction des habitants des 8 appartements de la propriété: Jane Mancini (Josie Bissett), vendeuse dans une boutique de vêtements mariée à Michaël Mancini (Thomas Calabro), médecin émérite à l'hôpital Wilshire Memorial; Sandy Louise Harling (Amy Locane), une serveuse qui voudrait devenir actrice; Rhonda Blair (Vanessa Williams), une afro-américaine qui donne des cours de danse; Allison Parker (Courtney Thorne-Smith), secrétaire dans une agence de publicité nommé "D&D"; Billy Campbell (Andrew Shue), un écrivain incertain; Jake Hanson (Grant Show), instable professionnellement et Matt Fielding (Doug Savant), l'ami sur qui on peut compter...

Bien vite, Melrose Place va imposer une touche dramatique spécifique. Dès la première saison, les personnages sont confrontés à une quantité d'éléments et d'évènements aux conséquences négatives : manipulations professionnelles, harcèlements sexuels et moraux, agressions, dépressions, infidélités, révélations sentimentales, alcoolisme, ruptures, problèmes d'argent, d'amitiés, de grossesse, de paternité, de santé... Intelligemment, les scénaristes ont compris que les seconds rôles (plus d'une centaine sur la totalité des épisodes du soap) sont essentiels pour donner de la profondeur et du rythme à une série télévisée. De plus, au lieu de tranquillement se reposer sur les personnages du début du show, ils en introduisent des nouveaux dès la première saison, dont l'importance sur la globalité du programme sera conséquente: le docteur Kimberly Shaw (Marcia Cross), la photographe Jo Reynolds (Daphne Zuniga), la soeur de Jane Sydney Andrews (Laura Leighton) et Amanda Woodward (Heather Locklear). Au travers de ces 32 premiers épisodes, on remarque une critique du capitalisme et de ses effets destructeurs sur les individus, qui sera récurrente par la suite.

Si on peut croire à la fin de la première saison qu'il n'est pas possible d'aller plus loin dans le bouleversant, les saisons qui suivent démontrent largement le contraire. Comme jamais dans une série, les scénaristes vont explorer très profondément la méchanceté, la folie et les malheurs humains. En tête des drames, on décerne sans aucun doute le prix de la personnalité la plus méchante, schizophrène et folle à Kimberly, qui deviendra une des icônes de la série. On peut par exemple lui attribuer plusieurs menaces de mort et tentatives de meurtre, le vol d'un bébé, une tentative de suicide ou encore l'explosion de la propriété à la fin de la saison 3. Quasiment au même niveau de cruauté, on retrouve deux autres piliers du programme à priori dominants mais qui ne sont pas non plus immunisés contre des abominations en tous genres contre leurs êtres: Amanda, à qui il arrive le meilleur (sa relation avec Peter, sa réussite professionnelle...) comme le pire (cancer, harcèlement, accident cardiaque, kidnapping...) et Michaël, qui a le caractère le plus machiavélique et amusant de la série. A l'opposé, côté victime absolue, Melrose Place possède Sydney qui, avant de mourir percutée de plein fouet par une voiture le jour de son mariage (!), passe par la prostitution, le strip-tease, des tentatives de viols, de multiples reniements de sa soeur Jane, des agressions physiques, une secte... Un tout petit peu en dessous, Melrose Place a aussi Allison qui, entre une constante compétition avec Amanda, un alcoolisme de longue durée, un viol par son père, une cécité et de nombreuses relations sentimentales avec des psychotiques, à de quoi marquer. Comme autres personnages stressants, torturés et instables, le soap a ses personnages violents persécuteurs et/ou manipulateurs (Taylor Davis jouée par Lisa Rinna, Patrick Muldoon dans le rôle de Richard Hart, Donna Mills dans la peau de Sherri Doucett Larson, la mère de Jane...) et ses individus tout d'abord gentils qui sont vite pervertis par les habitants de longue date de Melrose Place et leur environnement : Jane, avec laquelle les scénaristes prennent un malin plaisir à la faire souffrir (à moitié noyée par la marée montante sans la possibilité de bouger dans sa chaise roulante...); Peter Burns (Jack Wagner), qui alterne entre nervosité, pétage de plomb et gentillesse; Brooke Armstrong (Kristin Davis), que l'on retient surtout après sa mort lorsqu'elle hante l'esprit de Billy; Craig Field ( David Charvet), exploité par Amanda et déchiré par la mort de Sydney au point de se tirer une balle; Megan Lewis (Kelly Rutherford), utilisée par Kimberly et tourmentée par Michaël; Samantha Reilly (Brooke Langton), rattrapée par son passée; Kyle McBride (Rob Estes), qui subit bien malgré lui les dérives des autres...

Niveau sentimental et sexuel, la série explore quasiment toutes les possibilités imaginables. A part pour quelques relations récurrentes (Michaël et Jane-Kimberley-Sydney, Peter et Amanda, Jo et Jake, Allison et Billy), à Melrose tout le monde couche avec tout le monde sans que pourtant cela soit incohérent. En effet, l'équipe d'écriture des épisodes se débrouille pour que le sexe soit le reflet des faiblesses des protagonistes et une parenthèse qui les libèrent temporairement de leurs excès, de leurs incertitudes et des destins terribles qui s'abattent sur eux. Avec tous ses effets dramatiques et graves (on peut rajouter en vrac des incendies, des accidents de voiture, des falsifications de vérités, des traffics de drogue, des mariages qui ne durent pas plus de quelques jours, des amnésies, des enfermements en asile psychiatrique, de nombreux tabassages, des cures de désintoxication, des licenciements, des pressions en tous genres, des fausses couches...), Melrose Place dresse un intéressant tableau sociologique d'une micro-société américaine obnubilée par l'argent, la gloire et le sexe.

Riche du plus gros bagage dramatique jamais créé à la télévision, Melrose Place alterne aussi entre la comédie (avec par exemple les magouilles de Michaël et du Docteur Louis Visconti à partir de la saison 5), l'épouvante (les multiples retours de la mort de Kimberley, sa folie...), la psychologie (qui apparaît au travers de l'ingéniosité de la plupart des âmes de la résidence), la description de réalités sociales (viols, agressions, alcoolisme, drogue, questions de parenté, de maladies...) et économiques (la cruauté du monde du travail, le goût et les sacrifices pour le profit, la dépersonnalisation des individus...). Gardant tout le long de ses saisons un rythme frénétique, Melrose Place ne laisse à aucun moment au spectateur le temps de s'ennuyer. Pris dans le tourbillon d'histoires hallucinantes et passionnantes, il ne peut décrocher de ce soap qui restera probablement le meilleur de tous les temps.